Il faudra attendre sept ans avant que le nom de Françoise Sagan soit de nouveau affiché au fronton d’un théâtre . Commencèrent pour elle des années difficiles. Elle avait entrepris tout d’abord une nouvelle pièce à l’intention de Marie Bell, de la chanteuse Barbara et du comédien Hubert Deschamps . Il s’agissait d’une comédie loufoque mettant en scène deux dames respectables, confectionnant des ouvrages à l’intention d’œuvres de charité . Elles décrochèrent le premier prix de tricot qui consistait en un voyage à Paris , où les attendent les aventures les plus folles ... La pièce ne verra pas le jour .
Flammarion, la maison d’édition de Françoise ne lui renouvela pas son contrat . Néanmoins elle l’ obligea à publier encore chez elle afin d’épurer les avances importantes qui lui avaient été accordées .
Entre dépressions et périodes de surexcitation, au cours desquelles l’alcool et la drogue furent des adjuvants, Françoise poursuivait l’écriture de nouveaux romans : Des bleus à l’âme, en 1972, Le profil perdu en 1974. Désormais certains de ses personnages eurent recours comme elle à l’alcool et à la drogue . À travers eux, elle épanchait son mal de vivre : « Ces moments de plaisir, d’adhésion à la vie, si on se les rappelle bien, finissent par faire une sorte de couverture, de patchwork réconfortant qu’on pose sur le corps nu, efflanqué, tremblotant de notre solitude. Le voilà le mot lâché « solitude » » .
En 1976, Françoise fut opérée d’une pancréatique aiguë . L’alcool lui fut désormais interdit .
À la suite d’une convalescence dépressive, elle publia son dixième roman Le Lit Défait . Puis se remit à l’écriture d’une nouvelle pièce intitulée Il fait beau Jour et Nuit. dont l’héroïne, Zelda, avait été internée dans une clinique psychiatrique. Plus que sa folie , alors que on lui reprochait sa vie dissolue, elle reconnaissait volontiers ses excès. : « J’ai beaucoup aimé la cocaïne, j’ai beaucoup aimé le banco de cent millions, j’ai beaucoup aimé les gouapes dans les ruelles, j’ai beaucoup aimé les excitants, j’entends les gens et les comprimés excitants » . Mais était-elle la seule responsable de sa déchéance ?
Après la lecture du manuscrit, Guy Descaux, directeur de la Comédie des Champs-Élysées signa le contrat et engagea pour le rôle principal la jeune vedette Anna Karina . Lors des répétitions un désaccord survint entre le l’auteur et le metteur en scène Yves Bureau . Ce dernier se retira et Françoise dut assumer seule les dernières répétitions . La première représentation fut fixée au 16 octobre . Ce fut un mauvais jour . Au moment de quitter son appartement pour partir au théâtre, Françoise dut se changer de toilette de toute urgence, son chien venant de vomir sur le bas de sa robe . Pour rattraper son retard, elle appuya un peu trop sur l’accélérateur de sa voiture et fut arrêtée pour accès de vitesse … Elle arriva enfin au théâtre de la Comédie quelques minutes avant le lever du rideau et trouva le hall en plein ébullition : l’ascenseur chargé de mener les invités jusqu’à la salle de spectacles, sise au sixième étage, s’était décroché et les invités avaient été projetés les uns contre les autres . Il n’y avait pas eu de blessé, simplement une grosse frayeur, une dame en vison s’était évanouie … Dans ces conditions difficiles, le spectacle se déroula sans éclat . La presse fut détestable : « Hélas ! c’est à peine un brouillon, l’ombre d’une pièce, un soupçon de comédie … Pas de vraisemblance, pas de psychologie, pas de vérité, pas d’humour, pas même cette petite musique à laquelle Sagan nous a habitués… » .
Après un nouveau silence de neuf années, Françoise retrouva le théâtre en septembre 1987 avec L’Excès contraire . Il s’agissait cette fois d’une sorte de vaudeville, de par ses personnages, maris et femmes trompés, amants cachés dans les armoires, bons mots, répliques cocasses, mais dont l’action se déroulait dans le milieu de la noblesse militaire autrichienne, à la veille du drame de Sarajevo . La pièce montée par un jeune comédien de vingt-cinq ans, issu du Café-théâtre, Michel Blanc ( dont ce sera la première mise en scène ) fut présentée au Théâtre des Bouffes Parisiens . La critique ne fit aucun effort d’imagination pour découvrir, sous l’aspect gaudriole de la pièce, une certaine attaque de la société machiste . L’évolution de la Femme était en cours et Françoise Sagan ne pouvait que s’y associer . La presse fut moyennement bonne : « Les dialogues sont joliment troussés par Françoise Sagan, même si l’on se languit un peu au milieu de toutes ces pantalonnades, ces juponnades, plutôt. Après un début très enlevé, l’histoire piétine sur le parquet bien cirés des salons viennois, mais qu’importe » . . Par contre le public fit un triomphe au metteur en scène et aux principaux interprètes Dominique Lavanant et Martin Lamotte nouvelles vedettes de la jeune troupe du Splendid .
La carrière d’auteur dramatique de Françoise Sagan était terminée .
Les Bleus à l’âme Françoise Sagani se déroule dans un milieu ?????
Le Figaro Pierre Marcabru 18 octobre 1978
Le Figaro Pierre Marcabru 18 octobre 1978
Télérama Cécile Thibault, 17 août 1988, lors d’une retransmission de la pièce à la télévision